Pattaramon contemple le journal Thaï Rath depuis plusieurs heures sans réussir à déchiffrer l’article. Pourtant, c’est bien son histoire et celle de Gammy qui s’étale en une sur toute la première page. Elle a été prise en photo avec Gammy dans les bras.
Le Thaï Rath, le journal le plus lu de toute la Thaïlande!!
Il y a deux jours encore, Pattaramon et Gammy étaient des inconnus. Ils sont maintenant des stars nationales et internationales!
Et tout ça, grâce à un appel sur Facebook!
C’est sa soeur qui a eu l’idée, elle a filmé Pattaramon à l’hôpital avec Gammy sur les genoux tout en expliquant son histoire, comment elle avait porté les enfants d’un riche couple australien, comment les parents biologiques et commanditaires avaient fini par abandonner Gammy parce qu’il était malade et comment il était condamné faute de soins si personne ne payait pour son opération.
Une association caritative, Hands Across The Water Charity, s’est rapidement emparée de l’affaire et lui a donné une très vaste portée à travers son hashtag #HopeForGammy.
Très vite, l’histoire s’est répandue comme une trainée de poudre et a débordé les frontières de la Thaïlande. Comme le couple commanditaire est australien, les journalistes de ce pays ont eu vent de l’affaire et chacun y est allé de son article pour dénoncer l’innommable: l’instrumentalisation du corps des femmes pauvres des pays pauvres par les plus riches des pays riches et l’abandon des enfants qui ne correspondent pas aux attentes de ceux qui les ont commandés et achetés.
Même le premier ministre australien Tony Abbot a qualifié cette histoire “d’incroyablement triste” et fustige les commanditaires australiens qui se terrent dans leur villa de Bunburry.
L’association caritative a mis en ligne une cagnotte pour venir en aide à Gammy ainsi qu’à Pattaramon qui souhaite adopter l’enfant mais ne peut payer les frais d’hospitalisation.
Pattaramon prie mentalement depuis des jours pour trouver une solution et sa soeur semble l’avoir trouvée pour elle. Si les donateurs sont suffisamment nombreux, Gammy pourrait être sauvé.
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Pattaramon n’en revient toujours pas: La cagnotte a finalement atteint la somme incroyable de 230000 dollars australiens.
L’hospitalisation de Gammy est d’ores et déjà programmée. Et si le petit garçon s’en sort, son avenir est assuré ainsi que celui de la famille qui l’a adopté. Réticent au début, Anan a finalement accepté le souhait de Pattaramon quand il a vu les sommes folles rapportées par la cagnotte nourrie par l’émotion internationale. Sa femme et lui vont acheter une nouvelle maison plus grande pour loger leurs trois enfants et la belle-mère.
Les journalistes se succèdent au chevet du petit garçon depuis des semaines. C’est un véritable conte de fées moderne.
Pourtant Pattaramon est loin de se douter du nouveau danger qui la guette et des terribles accusations dont elle va faire l’objet.
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C’est un coup de tonnerre médiatique, une tempête de Breaking News, un tourbillon d’émissions, d’interviews et d’affrontements entre éditorialistes.
C’est à celui qui aura l’interview. Oui mais de qui?
De Pattaramon? Non, Pattaramon est oubliée.
Celui qui crève l’écran ce soir, c’est David Farnell, le père des enfants, depuis sa villa de Bunburry. La larme à l’œil et la voix tremblante, il explique le harcèlement dont il est victime depuis une semaine, comment sa femme et lui restent enfermés chez eux, terrifiés de tomber sur des journalistes qui rodent tout autour de leur propriété. Il est temps de s’expliquer pour faire cesser les terribles accusations. Si il prend la parole, c’est pour rétablir certaines vérités.
Les journalistes qui ont la chance de retransmettre ce moment unique se frottent les mains, ils se pourlèchent les babines. Rien de mieux que de bons gros rebondissements dans une affaire si riche en émotions. Car l’émotion fait couler beaucoup d’encre et de larmes et vend énormément.
David Farnell tient à rétablir certaines vérités.
Il explique qu’il n’a jamais abandonné le petit garçon mais que Pattaramon lui a dit qu’il n’avait plus qu’un jour à vivre et qu’il valait mieux l’enterrer sur place. Il l’accuse ensuite de ne pas avoir accouché à l’hôpital prévu par le contrat et qu’il soupçonnait que Pattaramon ne voudrait plus lui céder Pipah. Il avait donc pris la petite fille et serait rentré très vite en Australie avec elle. Ces accusations sont ignobles, répète-t-il, et nuisent terriblement à son image. Il ne supporte pas de se voir trainé dans la boue par tous les médias du pays. Personne n’est là pour le contredire et ses larmes et trémolos de voix plaident pour lui.
Les partisans de la GPA reprennent un peu d’audace et clament qu’on a un peu rapidement condamné un innocent. Pourtant Pattaramon pourrait témoigner: elle n’a jamais vu le couple commanditaire parce que tout est fait dans le monde feutré de la GPA pour que mères porteuses et parents d’intention ne se rencontrent jamais. Si le coût est très élevé pour le client, c’est justement pour rétribuer les nombreux intermédiaires entre eux.
Mais Pattaramon est tout à sa joie de pouvoir garder Gammy qui a subi avec succès sa chirurgie cardiaque et va de mieux en mieux.
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L’histoire pourrait s’arrêter là et pourtant elle réserve encore quelques rebondissements. Car David Farnell n’en est pas à son coup d’essai. En sa qualité de père biologique, il continue d’accuser, par le biais de son avocat cette fois, la mère porteuse de lui avoir pris Gammy et essaie de s’approprier le montant de la cagnotte destinée au petit garçon.
Il n’a pourtant pas un profil immaculé car en attirant ainsi la lumière sur lui, certains médias ont commencé à fouiller son passé et sont rapidement tombés sur les nombreuses condamnations qui pèsent sur lui. David Farnell a fait trois ans de prison pour agressions sexuelles sur mineures, une de dix ans et une de sept. Au compteur, il affiche pas moins d’une vingtaine de condamnations pour les mêmes raisons.
“j’ai changé!”clame-t-il maintenant.
En attendant, Pattaramon a engagé des démarches pour adopter également la petite Pipah.
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